19 juillet, 4h du matin. Grand beau, ciel étoilé, mais 5 cm de neige fraîche recouvrent toute la région. Lever reporté à 6h.
Vers 7h30, Christian et moi nous nous dirigeons vers la montagne. Nous nous encordons pour traverser le glacier et atteignons la rimaye 3/4 h plus tard. Nous attaquons la montée aux cordes fixes, raides et verticales par endroits, plus abordables dans les traversées. Nos sacs, remplis de cordes statiques et de matériel technique, sont lourds (env. 15 kg) et l'altitude nous raccourcit encore le souffle. La progression dans cette immense face est lente et pénible. Parties en neige alternent avec celles de rochers, entrecoupées çà et là de glace vive.
Après 3h d'effort, nous nous trouvons à 5000 m, altitude atteinte deux jours auparavant. Un bref repos suivi d'un changement d'équipement et déjà Christian attaque la pente de neige à 50°, encore vierge de toute visite humaine. Je m'occupe de son assurage et 40 m plus haut, il plante un spit avant de partir dans une traversée en rocher. Un 2e spit est placé à la main, avec marteau et tamponnoir. 50 nouveaux mètres de cordes fixes sont en place et j'ai l'honneur de les inaugurer pour rejoindre Christian. A mon arrivée, il échange ses crampons contre ses P.A. et attaque un dièdre pas trop difficile. Plus loin, plus haut, sur cette gigantesque face inconnue, Christian trouve instinctivement un itinéraire sûr et très direct. Tantôt sur des dalles d'excellente qualité, tantôt dans de larges fissures, il avance avec aisance dans cette énorme face composée de granit, de neige et de glace. Il est vraiment dans son élément.
En cours de route, nous sommes rejoints par Yann, qui nous amène 200 m de cordes fixes supplémentaires et plus tard, par Jean-Claude qui fait cordée avec lui. Le temps est agréable, ni trop chaud, ni trop froid. Vers 5200 m, Christian se retrouve devant une pente de neige et comme il a déposé ses crampons 100 m plus bas, il demande à Yann d'équiper cette dernière longueur. La journée touche à sa fin quand Antoine et Thierry, qui ont amélioré le bas de la voie, nous rejoignent également avec du matériel d'équipement. L'avance d'aujourd'hui est excellente: 200 m de cordes fixes mis en place et 400 autres mètres déposés au dernier relais qui attendent la suite.
Vers 16h, Christian et Thierry entament les rappels, suivis d'Antoine et de Jean-Claude. Après avoir mis un peu d'ordre dans le dépôt de matériel, Yann et moi-même entamons également la descente. Celle-ci est très rapide. S'il faut compter environ 4h pour monter les 900 m de cordes fixes, 1/2 h suffit à certains pour qu'ils se retrouvent au pied de la face!
Cette journée du 19 juillet se terminera malheureusement assez mal pour Thierry qui s'encouble malencontreusement dans une crevasse sur le glacier plat qui mène au camp 1: tendon d'Achille cassé au pied gauche et fin subite de son expédition en Hindu Kush. Commence pour lui, une longue attente de l'hélicoptère...
Simon, le 22.7.2000